Invité d’Europe 1 ce matin, Nicolas Dupont-Aignan a enfin saisi l’occasion de capitaliser sur la crise : il s’est moqué de la rencontre Sarkozy-Merkel en tirant à vue sur l’euro, selon lui « insauvable », et a développé ses solutions.
Faire oublier sa prestation mitigée de la semaine dernière sur RTL, c’était sans doute son objectif de ce matin. Nicolas Dupont-Aignan, bras croisés - peut-être passé au grill du mediatraining entre temps - avait l’air prêt pour son grand oral de rattrapage. Et face à un Thierry Guerrier particulièrement musclé, connu pour laisser rarement un instant de répit à son interlocuteur, force est de constater que le député de l’Essone a sortit le grand jeu. Avec dans sa manche, maintes références et exemples pour étayer son attaque en règle de l’euro destructeur et de l’aveuglement des gouvernements en place mais aussi un concept phare : le souci de l'«économie réelle», et ses solutions à la crise de la dette : la création d’emploi et la relocalisation des activités en France.
Nicolas Sarkozy et Angela Merkel « font semblant de sauver l’euro » attaque d’emblée Dupont-Aignan en fustigeant l’incapacité des dirigeants européens et de la BCE à voir la réalité en face. Et d’asséner le diagnostic qu’il avait déjà mis au centre de sa campagne pour l'élection présidentielle : « l’euro n’est pas sauvable tout simplement parce que l’euro ruine les pays du Sud et la France ». Alors quand Thierry Guerrier, se faisant l’avocat du diable, lui objecte les « calculs de la BCE » et la « création de plus d’un millions d’emplois depuis 2002 », le chef de Debout la République ricane : « c’est une blague !», et sort sa calculette.
« La France a perdu un million d’emplois industriels depuis 10 ans, juste la période de l’euro », affirme-t-il. On dirait bien que le député de l’Essone a préparé ses fiches. D’après son « petit calcul », « le gouvernement français a endetté les Français depuis un an de 60 milliards d’euros, c’est-à-dire de deux mille euros par habitant ». Référence évidente à « l’argent déversé dans des puits sans fond » pour la Grèce, le Portugal et l’Irlande. Et d’enfoncer le clou : « On dit aux français serrez-vous la ceinture, on va supprimer des policiers, des enseignants, des infirmiers et puis de l’autre là, le 6-7 septembre, on convoque le Parlement pour jeter par la fenêtre 15 milliards d’euros ».
Les arguments ne manquent vraisemblablement plus à celui qui peut enfin utiliser la carte du « je vous l’avais bien dit ». La taxe sur les flux financiers ? Une « bonne mesure » qu’il « réclame depuis des années » et qu’il « espère enfin voir » mise en place. Des sanctions disciplinaires pour les pays dont les finances ne seraient pas saines ? « Mais on peut mettre les chars allemands ou français à Athènes pour tirer sur la foule », ironise avec insolence Dupont-Aignan, qui sait que la Grèce, l’Italie et l’Espagne, sont, pour lui, autant d’exemples qui lui donnent raison.
« On amuse les Français avec de fausse solutions », se reprend-t-il, mais, pour lui, la vraie question est celle de ce qu'il nomme « l’économie réelle », c'est-à-dire celle du « déficit commercial de la France », de la « délocalisation en cinq ans de la moitié de la production automobile française ». La faute à « la surévaluation de 40% de l’euro » et au « libre-échange déloyal de la Chine » fustige le chef de Debout la République. Relocaliser les activités de la France et créer des emplois : voilà la solution de celui qui ne manque pas de continuer à jouer les prophètes. « Si on ne s’occupe pas de l’économie réelle, on va arriver à des déserts sociaux et à des révoltes politiques », prévient-il avant de prédire que la France va tomber dans « une récession sans précédent » si le gouvernement continue à jouer à la « fausse vertu » comme avec la règle d’or.
Bref, tout juste grimaçant quand Thierry Guerrier le rapproche de Marine Le Pen, Dupont-Aignan est visiblement remonté à bloc par la crise. Certain d’avoir ses parrainages, le plus fervent ennemi de l’euro peut donc lancer sa croisade pour 2012.
Chloé Demoulin - Marianne
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